espace

Maîtrise d'informatique - Module 18
Traitement du signal - Cours



Chapitre 1 :

  • 1. Quelques rappels mathématiques.
  • 2. La fonction exponentielle.
  • 3. Les familles de fonctions exponentielles.

  • Ce chapitre vise à rappeler un certain nombre de concepts mathématiques de base, dans les domaines de l'algèbre linéaire et de l'analyse. Il a pour but de "préparer le terrain", en vue de l'introduction de la transformation de Fourier qui sera faite dans le chapitre 2.

    1. Quelques rappels mathématiques.

    Dans ce paragraphe, plusieurs définitions de base d'algèbre linéaire vont être rappelées.

    1.1. Combinaison linéaire.

    On appelle combinaison linéaire des vecteurs a1, a2, ..., an, toute somme de la forme suivante :

    image 1

    Dans cette somme finie (c'est-à-dire ne comportant qu'un nombre fini de termes), les coefficients x1, x2, ..., xn sont en général réels ou complexes.

    1.2. Espace vectoriel.

    On ne se préoccupera pas de donner la définition exacte d'un espace vectoriel, dans le cadre de ce cours. La propriété essentielle d'un espace vectoriel est la suivante : toute combinaison linéaire d'éléments (ou vecteurs) d'un espace vectoriel appartient à cet espace vectoriel. On dit qu'un espace vectoriel est stable par combinaison linéaire.

    Exemples :

    1.3. Famille libre.

    On appelle famille libre tout ensemble, non forcément fini, d'éléments d'un espace vectoriel, soit image 2, tel que, si une combinaison linéaire image 3 de ces éléments est nulle (J doit nécessairement être un ensemble d'indices de cardinal fini n), alors forcément tous les coefficients x1, x2, ..., xn sont nuls.

    1.4. Famille génératrice.

    On appelle famille génératrice d'un espace vectoriel, tout ensemble, non forcément fini, d'éléments de cet espace vectoriel, tel que tout élément de l'espace vectoriel est égal à une combinaison linéaire au moins des éléments de cet ensemble.

    1.5. Base.

    On appelle base d'un espace vectoriel toute famille de cet espace vectoriel qui est à la fois libre et génératrice.

    1.6. Dimension d'un espace vectoriel.

    On peut montrer que toutes les bases d'un même espace vectoriel possèdent le même nombre d'éléments. On appelle dimension d'un espace vectoriel le nombre d'éléments d'une base quelconque de cet espace vectoriel.

    Exemples :

    2. La fonction exponentielle.

    Dans ce paragraphe, nous allons introduire la fonction exponentielle en recherchant les solutions d'une équation différentielle. La fonction exponentielle est fondamentale en traitement du signal, et intervient en particulier dans la définition de la transformation de Fourier, comme nous le verrons au chapitre 2.

    2.1. Résolution d'une équation différentielle.

    Soit l'équation différentielle suivante, dans laquelle l'inconnue est la fonction f(u), supposée dérivable :

    image 6                (1.1)

    Cette équation doit être vérifiée par f(u), pour toute valeur de la variable réelle u. C'est une équation différentielle linéaire, à coefficients constants, du premier ordre de dérivation, homogène (c'est-à-dire à second membre nul). Sa caractéristique la plus intéressante est d'être linéaire, car cela implique que l'ensemble de ses solutions, soit E, est un espace vectoriel. Montrons en effet que, si f1(u) et f2(u) sont deux solutions quelconques de (1.1), et si x1 et x2 sont deux réels quelconques, alors (x1f1+x2f2)(u) est également solution :

    image 7

    Les deux parenthèses du membre droit étant nulles, on en déduit que (x1f1+x2f2)(u) est bien solution de (1.1).

    Comme E est un espace vectoriel, résoudre (1.1) revient à chercher une base de E. Nous allons d'abord tenter de trouver une telle base parmi les fonctions monômes, qui constituent une famille libre de fonctions.

    2.1.a. Utilisation de la famille des fonctions monômes.

    image 8

    2.1.b. Recherche des solutions analytiques de l'équation (1.1).

    On souhaite trouver les solutions analytiques de l'équation (1.1). Soit une fonction analytique, définie par :

    image 9                (1.2)

    Sa dérivée s'écrit :

    image 10

    En faisant un changement d'indice, on réécrit cette somme :

    image 11

    En combinant cette expression avec (1.2), on obtient :

    image 12

    Une condition suffisante pour que cette expression s'annule est que, pour tout entier i :

    image 13

    On peut montrer que c'est également une condition nécessaire. Les coefficients xi sont donc déterminés de manière récurrente, à partir de la donnée de x0 :

    image 14

    Il est rappelé que 0! est égal à 1, par convention.

    2.1.c. Calcul de la somme (1.2).

    En réinjectant l'expression de xi trouvée précédemment dans (1.2), on obtient :

    image 15                (1.3)

    La somme apparaissant dans le second membre est-elle convergente, pour tout u réel ? On montre que oui, et on définit la fonction exponentielle exp(u), également notée eu, par cette somme :

    image 16                (1.4)

    D'après (1.3), les solutions analytiques de (1.1) s'écrivent :

    image 17

    où x0 est un réel quelconque. L'intersection des espaces vectoriels E et A, qui est un espace vectoriel, admet donc comme base la fonction exponentielle, ce qui signifie que cet espace vectoriel est de dimension 1.

    Signalons au passage que la résolution directe de l'équation (1.1), par la méthode de "séparation des variables", aurait donné très simplement le résultat précédent.

    2.2. Généralisation de la fonction exponentielle.

    2.2.a. Cas d'une variable imaginaire pure.

    Par analogie avec (1.4), on définit la fonction exponentielle d'une variable imaginaire pure jv, où j2=-1, de la façon suivante :

    image 18

    En séparant partie réelle et partie imaginaire, on obtient :

    image 19

    Les deux sommes apparaissant dans le second membre sont convergentes, pour tout réel v. On les appelle par définition cosinus et sinus de v, fonctions que l'on désigne respectivement par cos et sin, de sorte que :

    image 20                (1.5)

    2.2.b. Propriété intéressante de la fonction exponentielle.

    Avant de passer au cas d'une variable complexe, prouvons la propriété suivante de la fonction exponentielle, pour deux réels u et w quelconques :

    image 21

    En utilisant seulement la définition (1.4), cette propriété est relativement difficile à prouver. Il existe cependant une démonstration plus astucieuse. Supposons d'abord que w soit un réel fixé. La fonction eu+w est alors une fonction de la seule variable u, que l'on note par exemple fw(u). Sa dérivée est facile à calculer, en utilisant la formule bien connue de la dérivée de la composée de deux fonctions :

    image 29

    Ceci signifie que fw(u) est solution de (1.1). Comme c'est une fonction analytique, on peut affirmer, d'après l'étude faite dans le paragraphe précédent, qu'il existe une fonction x0(w), ne dépendant pas de u, telle que :

    image 22

    De la même façon, on montre l'existence d'une fonction x1(u), telle que :

    image 24

    En égalant les seconds membres de ces deux égalités, on déduit qu'il existe une constante réelle x2, telle que :

    image 23       et       image 25

    D'où l'égalité suivante :

    image 26

    En annulant simultanément u et w, et sachant que la fonction exponentielle vaut 1 en 0, on en déduit que x2 vaut 1. On obtient donc bien la propriété annoncée plus haut, c'est-à-dire :

    image 21                (1.6)

    Cette propriété se généralise facilement au cas où u ou w est imaginaire pur. Nous pouvons maintenant donner l'expression de la fonction exponentielle d'une variable complexe quelconque.

    2.2.c. Cas d'une variable complexe quelconque.

    Dans le cas d'une variable complexe quelconque, on pourrait encore définir la fonction exponentielle par analogie avec (1.4), mais cela risquerait d'être un peu compliqué. Mieux vaut utiliser la propriété (1.6) vue précédemment, qui permet d'écrire, si u et v sont deux réels quelconques :

    image 27

    En utilisant l'égalité (1.5), on obtient :

    image 28                (1.7)

    3. Les familles de fonctions exponentielles.

    Dans ce paragraphe, nous allons faire un petit récapitulatif sur les notions qui ont été abordées jusqu'à présent et, en particulier, nous allons revenir sur les différents espaces vectoriels de fonctions qui ont déjà été introduits.

    3.1. Les différentes familles de fonctions exponentielles.

    A la lumière du paragraphe précédent, on peut distinguer les trois familles de fonctions exponentielles suivantes :

    3.2. Ces familles sont des familles libres.

    On peut remarquer que la famille de Laplace contient les deux autres familles. Nous allons montrer que la famille de Laplace est une famille libre. Si tel est le cas, toute sous-famille d'une famille libre étant libre (cela est facile à vérifier), on aura aussi montré que les deux autres familles sont libres.

    Soit donc une combinaison linéaire de n fonctions de Laplace distinctes :

    image 33

    Supposons que cette fonction soit nulle, quel que soit t réel. En ce cas, toutes les dérivées successives de f(t) sont également nulles. Donc en particulier, pour tout entier k compris entre 0 et n-1 :

    image 34

    c'est-à-dire :

    image 35

    Ceci constitue un système de n équations linéaires à n inconnues, qui sont les coefficients complexes xi. Le déterminant de ce système s'écrit :

    image 36

    C'est un déterminant de Van der Monde, bien connu en algèbre linéaire, dont on peut montrer qu'il vaut aussi :

    image 37

    où l (il s'agit de la lettre l et non pas du chiffre 1) et m sont compris entre 1 et n. Or, on a fait l'hypothèse que tous les complexes si étaient distincts, donc cette expression est non nulle. Par conséquent, le système d'équations précédent est un système de Cramer, n'admettant que la solution évidente suivante :

    image 38

    Ceci prouve bien le résultat annoncé, c'est-à-dire que la famille de Laplace est une famille libre.

    Dorénavant, nous ne nous intéresserons plus qu'à la famille de Fourier.

    3.3. Les espaces vectoriels définis à partir de la famille de Fourier.

    Faisons un raisonnement par analogie :

    On peut faire un récapitulatif de ces quatre espaces vectoriels de fonctions, sous la forme du tableau suivant :

    espace

    vectoriel

    construit à

    partir de la

    ayant pour

    base la

    ayant pour éléments

    les fonctions du type

    appelées
    P famille des

    monômes

    famille des

    monômes

    image 39 fonctions

    polynômes

    A famille des

    monômes

    ? image 9

    si cette somme est convergente,

    quel que soit le réel u

    fonctions

    analytiques

    F famille de

    Fourier

    famille de

    Fourier

    image 41 ?
    T famille de

    Fourier

    ? image 42

    si cette intégrale est convergente,

    quel que soit le réel t

    "fonctions admettant

    une transformée

    de Fourier"

    Remarques :

    image 43


    Ces pages ont été réalisées par Jean-Denis Durou.
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