Une contribution IRIT dans le cadre de la COP26

L’informatique peut sauver la planète ? En tout cas, les modèles informatiques peuvent contribuer à mieux comprendre les effets des différentes politiques qui pourraient être mises en place pour lutter contre les menaces qui la guette. C’est ce que montre Benoît Gaudou, maître de conférences à l’Université Toulouse Capitole et membre de l’équipe SMAC-IRIT, et un groupe de chercheurs franco-vietnamien, à travers leur contribution au projet de recherche GEMMES. Il s’agit d’une coopération entre le gouvernement vietnamien, l’AFD (Agence française de développement) et l’IRD (Institut de Recherche pour le développement), dans le but de mener une étude permettant d’évaluer “les différents impacts socio-économiques du changement climatique et des stratégies d’adaptation possiblement mises en œuvre au Vietnam.” Le rapport “Climate change in Viet Nam Impacts and adaptation” a été présenté à la COP26 de Glasgow et remis aux autorités vietnamiennes.

Le delta du Mekong, une zone très sensible

Le Vietnam est un pays particulièrement vulnérable aux conséquences du changement climatique. Il compte en effet plus de 3200 km de côtes. Selon le scénario d’une montée des eaux d’un mètre, 5 % des terres émergées du pays pourraient disparaître. Cette situation concerne notamment le delta du Mékong, et cela menace la sécurité économique et alimentaire du pays. La hausse des températures, qui a notamment pour conséquences une intensification des typhons, une augmentation des sécheresses et des phénomènes d’érosions fluviale et côtière, est aussi au centre des inquiétudes.

Selon l’AFD (Agence française pour le développement), “l’adaptation au changement climatique passe nécessairement par l’adaptation de cette population et de ses pratiques agricoles, notamment l’utilisation des terres.

Cette nécessité de s’adapter fait l’objet d’une coopération entre le gouvernement vietnamien, l’AFD et l’IRD, qui ont décidé de mener une étude intégrée jusqu’à l’horizon 2050. L’objet de recherche porte sur les différents impacts socio-économiques du changement climatique et sur les stratégies d’adaptation qu’il est possible de mettre en œuvre au Vietnam. Les réponses à des scénarios d’augmentation globale de température de 1,5°C, 2°C ou 3°C correspondent à différents scénarios de changement climatique global. Ces scénarios intègrent différentes bases de données qui doivent être intelligibles et analysées de manière optimisée.

Ainsi, les modèles et technologies informatiques peuvent apparaître comme de véritables outils pour les stratégies d’adaptation au changement climatique. Ils constituent un véritable support pour collecter et analyser des données, et simuler des scénarios complexes pour comprendre quelles sont les solutions les plus optimales face à l’urgence de la situation environnementale.

L’informatique au service de l’environnement

Benoit Gaudou, dans le cadre de son accueil par l’IRD au Vietnam, a participé à l’élaboration du chapitre 10 (page 441) du rapport présenté à la COP26. Ce dernier a pour objectif de présenter comment l’utilisation de modèles informatiques peut permettre de représenter et de comprendre les interactions entre les stratégies d’adaptation à différentes échelles spatiales et sociales, dans plusieurs scénarios climatiques. Il met en lumière l’apport de la modélisation agent sur l’évaluation de stratégies d’adaptation.

Ces modèles informatiques sont des variations d’un modèle de base appelé LUCAS (Land Use Change for Adaptation Strategies). LUCAS simule les interactions entre les stratégies individuelles et collectives et leurs effets sur l’utilisation des terres. LUCAS fournit une projection de l’utilisation des terres dans le delta du Mékong pour 2030, avec une anticipation jusqu’à 2050, ce qui permet de concevoir des projections sur le long terme. Les données d’entrée pour la vérification et la calibration du modèle sont collectées à partir de la carte d’utilisation des terres pour 2015 et interprétées à partir d’images Sentinel 2 pour 2020.

Cette approche a l’avantage de prendre en compte différents paramètres indissociables pour mettre en place des stratégies d’adaptation au changement climatique. LUCAS montre qu’il est possible de considérer dans un modèle, simultanément, les efforts d’adaptation au niveau individuel et les stratégies proposées au niveau régional, dans le but d’évaluer de façon précise l’efficacité de ces dernières. Cette approche favorise également l’intégration ultérieure de modèles plus spécialisés appliqués pour les rendements rizicoles, pour le transport de sel et de sédiments, pour les données démographiques, entre autres. Les expériences virtuelles basées sur LUCAS ont le potentiel de changer la façon dont la planification de l’adaptation est menée à l’avenir.

Les modèles informatiques permettent donc de calculer les zones d’utilisation des sols exposées aux risques dus aux effets du changement climatique. Ils permettent de simuler les changements d’utilisation des sols dans le delta du Mékong, année par année, sous l’influence de stratégies d’adaptation à différents niveaux. Les principaux indicateurs des changements climatiques et les paramètres précis permettent au modèle d’être utilisé pour analyser et optimiser les solutions possibles.